Le numérique, aussi en théorie

Si la musique, par nature, est profondément liée aux interactions humaines, il n’a pas fallu attendre l’isolement forcé d’une pandémie pour que l’institution connecte sa pédagogie aux pratiques numériques.

« Les services en ligne étaient déjà présents dans l’enseignement de certains professeurs, notamment pour proposer des documents complémentaires à leurs cours », note Charlotte Perrey Beaude, responsable du département théorie à l’HEMU. « Mais il est vrai que la plupart des professeurs ne connaissaient pas encore Cyberlearn, ou en avaient un usage assez élémentaire. Dans le contexte du distanciel, nous avons eu recours à cette plateforme et y avons découvert des potentialités incroyables ! »

C’est que cette plateforme numérique, mise à disposition des écoles de la HES-SO depuis 2005, offre une grande variété d’outils, de la reconnaissance audio à l’évaluation commentée, du fichier annoté au quizz. De quoi ouvrir de nouvelles perspectives pédagogiques en complément aux cours sur Zoom régulièrement entachés de problèmes de connexion, de son, voire d’attention.

Les professeur·es de théorie sont les plus concernés, pour être restés le plus longtemps en mode distanciel après les différents confinements. Si toutes et tous n’ont pas fait preuve du même enthousiasme devant ce nouvel horizon dématérialisé, la plupart en a profité pour repenser sa pratique. « En 2021, nous avons pu prendre le temps d’adapter les objectifs pédagogiques en fonction de ce qu’il était possible de faire en ligne, par exemple en proposant de capsules vidéo que les étudiants peuvent voir et revoir à l’envi. Cela a bien fonctionné, notamment pour les cours de solfège et de composition », constate la responsable. Elle y voit aussi une manière d’offrir aux étudiant·es de meilleurs suivis individuels.

En 2021, nous avons pu prendre le temps d’adapter les objectifs pédagogiques en fonction de ce qu’il était possible de faire en ligne

Charlotte Perrey Beaude, responsable du département théorie à l’HEMU

Arnaud Chevalley , qui enseigne plusieurs branches théoriques à l’HEMU, fait partie des plus fervents explorateurs du numérique. « J’ai vu cette contrainte des cours à distance comme un défi pédagogique très stimulant ! En histoire de la musique notamment, j’ai proposé du contenu en vidéo, complété par des écoutes préparant aux examens. Les retours des étudiants ont été très favorables, et leurs résultats comparables à ceux des autres années. »

Pour lui, cette période de confinement a surtout mis en évidence la nécessité d’une réflexion plus approfondie sur les pratiques pédagogiques en lien avec le numérique. « L’institution nous a laissé les coudées franches pour développer nos propres outils, ce qui de mon point de vue était plutôt appréciable. » Il mène cette année un projet de classe hybride : « Les étudiants ont pu s’inscrire, au choix, dans une classe traditionnelle avec cours en présentiel, ou dans une classe inversée avec contenu délivré sous forme de vidéos. La moitié a choisi ce modèle. C’est un projet encore expérimental mais j’aimerais pouvoir le développer à l’avenir. »

Une évolution qui, pour Charlotte Perrey Beaude, s’inscrit dans une prise de conscience plus générale, de la part des professeur·es et directions des HEM, quant à l’importance des pratiques numériques dans les métiers de la musique. « Chaque musicien, aujourd’hui, doit être familier de ces pratiques, que ce soit dans l’enseignement ou pour la valorisation des compétences et des carrières, mais aussi dans des domaines plus usuels que sont le traitement de son, l’édition de partition ou l’informatique musicale en général. Toutes ces pratiques, dont certaines déjà bien établies ces dernières décennies, ont désormais une place fondamentale dans la formation des étudiants. »